Femme canon

Je me voyais déjà petite marcher en long et puis en large
Je feuilletais tous les magazines transformant les jeunes filles en dames
Je paradais dans la cuisine et mon père frappait dans ses mains
Je priais Dieu d’être l’icône de Chanel ou de Lancôme

À 10 ans j’étais si grande que ça faisait rire les garçons
Mais dans le miroir de ma chambre, j’avais tout d’une femme canon

Moi, moi, je rêve d’être la reine des passerelles
De défiler à l’infini entre Milan et Paris
Moi, moi, je rêve d’une star dans le ciel
Et sous le fard et le maquillage, je serai la lumière dans l’image

Et puis un jour j’ai eu 16 ans, mon rêve a frappé à ma porte
J’ai vite convaincu mes parents et l’homme qui roulait en Porche
J’ai pris l’avion, j’ai pris le train, j’ai pris mon rêve en pleine figure
Personne ne frappait dans ses mains là où les mots blessent comme des brûlures

J’étais trop ronde ou bien trop brune, trop fragile ou trop commune
Mais je n’venais pas d’aussi loin pour si tôt rebrousser mon chemin

Moi, moi, je rêve d’être la reine des passerelles
De défiler à l’infini entre Milan et Bali
Moi, moi, je rêve d’une star dans le ciel
Et sous le fard et le maquillage, moi je suis la lumière dans l’image

Aujourd’hui on connait mon nom chez tous les grands couturiers
Et puis, quand le champagne est bon
Je peux sourire tant que vous voulez
Sous la lumière des grands podiums, moi, mes yeux se sont éteints
J’ai tant privé mon corps de formes que même mon âme n’a plus faim
Mes parents sont fiers comme jamais quand je suis à la télévision
Mais bien peu connaissent le boulet que doivent porter les femmes canons

Moi, moi je rêve que j’ai toujours 16 ans
Et que je retourne à l’école pour que ma vie se recolle
Moi, moi, je rêve que je souris pour rien
Mais sans le fard et le maquillage