À une bourse
De doigts mignons oeuvre mignonne
Petit filet de soie et d'or
Charmant toi-même et plus encor
Charmant par la main qui te donne!
Va! ne crains pas que je t'ordonne
D'enfermer un pauvre trésor
D'argent! les rimeurs n'en ont guère;
Mais en eussent-ils par monceau
Il salirait ton fin réseau:
Ton destin sera moins vulgaire
Et tu seras le reliquaire
De mon coeur et de mon cerveau
J'emplirai tes mailles de soie
De mes vers les plus parfumés
De ces confidents bien-aimés
Que nous ne voulons pas qu'on voie!
Car dans leurs plis sont notre joie
Et nos désespoirs enfermés!
Et quand l'âge, glaçant la source
De la joie et de la douleur
Laissera languir sans chaleur
Mon âme à la fin de sa course
Je t'ouvrirai, petite bourse
Que tiens l'épargne de mon coeur!