Ronsard 96
Quand tu t'en vas, que tu me laisses
Pour aller vers d'autres amants
Que tu ne tiens plus tes promesses
Et joue avec mes sentiments
Alors en moi, je deviens bête
Et j'ai de mauvaises pensées
Je songe au temps de ta défaite
Lorsque le temps t'aura vidé
Quand t'auras perdu ta jeunesse
Tu ne seras qu'une fleur fanée
Je veux que tes amants te laissent
Et que tu te mettes à douter
Je veux qu'un jour tu connaisses
La peur de ne plus être aimée
Qu'un jour, ta beauté disparaisse
S'essoufflant avec les années
Quand tu n'auras plus cette grâce
Qu'ont les jeunes filles de quinze ans
Ce jour-là, tu perdras la face
À la face de tes soupirants
Tu auras beau faire des manières
Mais tout ça ne changera rien
Celle qui vit sur sa chair
Ne peut faire un très long chemin
Quand t'auras perdu ta jeunesse
Tu te lèveras tôt le matin
Pour dissimuler les faiblesses
De ce visage que tu peins
Alors moi, j'aurai un sourire
Et je me souviendrai du temps
Où tu avais un avenir
Dans la splendeur de tes vingt ans
Mais je m'égare et je délire
Car tu es si belle à présent
J'aurai moi aussi à souffrir
De ce temps voleur de printemps
Mais, que veux-tu, c'est ma vengeance
De penser que ce jour viendra
Où tu connaîtras la souffrance
Que je connais à cause de toi