Rutsah
Un crépitement fait vibrer les tempes.
Il impérialise la perception. Seul, dans les pas de mon ombre sur le chemin je vais...
... La vie va et vient, cette masse en action haletante.
Troupeau bestial qui vit son instant, profite du moment.
Je la sens, la devine dans mon réveil obscur. Seul, mince, un rayon clair parcours la pièce.
Il me dégoûte, les cloches sonnent. Je suis pourtant comme eux.
Je vois ces treize nouvelles heures. A passer dans ma semence sordide.
Leur songe sophistiqué incarcère lentement. Mon esprit calciné, divergent.
Je me lève et m'habille, embrasse ma femme et ma fille.
Ma peau diurne me sert un peu. Le trou quotidien s'ouvre. Sauvez-moi.
Je me revois enchaîné à ma chaise. Ils allument les feux, les cloches continuent à sonner.
J'entends chanter des litanies. Mes pieds sont réduits en cendres.
Mes muscles craquent, ma moelle et mon sang sifflent.
Ma chair se consume comme du cuir rétrécit. Deux bâtons desséchés et noircis.
Les os de mes jambes pendent au dessus des flammes.
Qui montent, bientôt lapent mes cheveux. Ma tête est une boule de métal en fusion.
Mes yeux étincellent puis fondent dans leurs orbites. Si j'ouvre la bouche, je bois du feu.
Si je la ferme le feu est à l'intérieur et pourtant. Les cloches sonnent toujours. Sauvez-moi !
Je me situe entre les dernières limites de la partie humaine. Et les frontières de la vie supérieure.
Je ne connais pas les heures. Mon Lucifer latent bourdonne à l'ombre de mon ouie. La tête cornée, chantonne de sombres liturgies. Je ne fuis, je ne puis. Je ne suis pas fou ni loup.
J'entends sa révolte luciférienne. Il règne.
Il fait route vers le monde depuis que le monde est monde.
Je m'exécute à sa voix, il me nomme le sens occulte de son émoi.
A sa vue, je vomirais de peur tant son tronc est large et froid.
Il supplante ma couche dérobant bible et crucifix.
Vers minuit mon esprit se morcelle car je dois défier dieu.
Je suis promis à la vie éternelle je fais ces choses tant que je peux.
Tant qu'il m'appelle. Je ne connais pas les heures. Mon Lucifer sort du trou, noire lumière.
Sa voix bestiale me dicte et m'étreint. Je me fends en deux nous ne faisons plus qu'un.
Dans cette lumière, tu seras à moi aux siècles des siècles.
Les ténèbres seront les témoins de notre union. Et les foudres du ciel seront nos cierges.
Je possède, j'embrase nos étreintes par l'extrême onction. Moi, le fiancé de la perdition.
Mon existence dévorée de l'anathème. Aime moi sur l'autel brûlant du blasphème.