Le vendeur de roses
T'as dit au revoir au Bangladesh
À ta p'tite femme, tes trois enfants
Et dans la soute d'un bateau de pêche
T'es parti rejoindre l'Occident
T'imaginais qu'en venant ici
T'allais la peindre ta vie en rose
Mais Paris c'est pas le paradis
Et dans ton quotidien morose
Tu vends des roses
Maintenant tu marches neuf heures par soir
Avec ton bouquet à la main
Tu déambules de bar en bar
Évidemment, toi, tu bois rien
Tu tends les fleurs et tu souris
Pensant servir une noble cause
Mais l'romantisme c'est fini
Faut du mythique, du machin-chose
Tu vends des roses, tu vends des roses
Tu connais mieux la capitale
Qu'un vieux taxi presque à la retraite
Et comme un bandit en cavale
Tu vis la nuit et en cachette
Tout le monde te croit Pakistanais
Les préjugés c'est quelque chose
Et l'émotion que tu connais
C'est le mépris à forte dose
Tu vends des roses
Tu passes bien moins inaperçu
Aux yeux de ceux qui ont trop bu
Les hommes ont le cœur généreux
Quand ils ne sont plus vraiment eux
Le prix de cinq petites gorgées
C'est ton bénéf' le plus grandiose
À ceux qui s'enfilent du rosé
Sans se soucier de la cirrhose
Tu vends six roses, tu vends six roses
Tu vends des roses
T'aurais préféré faire la plonge
Dans l'arrière salle d'un p'tit resto
Vendre des fruits à la Place Monge
Juste à la sortie du métro
Un vrai statut, un vrai salaire
Ça serait le Graal, l'apothéose
Mais sans papiers, c'est la galère
Tu fais le métier qui s'impose
Tu vends des roses
En attendant des jours moins gris
Que me pardonne l'ami Bécaud
Je t'ai dit tellement de fois "non, merci"
Que j'te devais bien ces quelques mots
Et si je peux servir ta cause
En chantant partout ces couplets
Pour qu'on t'envoie moins sur les roses
Et pour qu'il y est plus de respect
Ce serait le bouquet, ce serait le bouquet
Ce serait le bouquet