EMIGRE
Il venait tout droit
son violon sous le bras
d'un ghetto polonais ça s'voyait
D'une ville polonaise
aux cent carillons
qui sonnaient aux beffrois
La peur et la mort
sur son front bien trop pâle
dès l'enfance avaient gravé leurs noms
la peur et la mort
et tellement d'autres choses
dont jamais il ne voulait parler
Ses yeux fiévreux
beaucoup trop fiévreux
trop profonds trop tristes
ont marqué mon âme
à tout jamais
Je le revois accordant son violon
de ses mains si blanches
son sourire si doux me hante encore
Chaque jour il partait
son violon sous le bras
Et mon cœur se serrait chaque fois
Il tenait par la main
sa fille une enfant
c'est tout c'qui lui restait
Sa femme et ses amis
ses parents étaient morts
aucune tombe n'existait à leur nom
Rayés de la vie
par ces terribles choses
dont jamais il ne voulait parler
C'était la guerre
nous étions voisins
et il venait s'asseoir
chez nous en souriant
doucement le soir
Je le revois accordant son violon
de ses mains si blanches
Son sourire si doux me hante encore
Il venait tout droit
son violon sous le bras
d'un ghetto polonais ça s'voyait
Il fut arrêté
avec son enfant
l'hiver était très froid
La nuit et la mort
les souffrances qu'il craignait
quelque part en Pologne furent leur sort
La peur et la mort
et tellement d’autres choses
dont jamais il n’avait voulu parler
Ses yeux fiévreux
Beaucoup trop fiévreux
trop profond trop triste
ont marqué mon âme
à tout jamais
Je le revois accordant son violon
de ses mains si blanches
son sourire si doux me hante encore