Sans coeur et sans corps
D'un mouvement violent et d'un regard, tu balaies tout ce que t'avais empilé dans l'espoir brouillon, candide,
désemparé, d'effleurer d'un doigt cette grosse pute d'éternité. Maladroitement mais fièrement et sans halte. Ta
descente s'encre sur nos photos de famille, à moitié brûlées ou aux pourtours vitriolés. Impure, sanglante,
dévisagée, il t'a fallu cette fois te faire violence pour exister maladroitement, faiblement et sans gloire. Autour
d'un spectacle désinvolte, ou pourtant personne ne semble vouloir abdiquer, tu vacilles comme une enfant
désinhibée. Au milieu de tes pendantes, les genoux écorchés et les bras écartés, toujours sujette à se suffire,
toujours sujette à s'abreuver sans s'assouvir. Seule l'ivresse funeste t'attire à bien des égards. Loin d'une foi
modeste qui se nourrit lentement de tes déboires. L'impureté est maîtresse de ces débats faibles, persistants.
Ces chansonnettes, poussées jusqu'au sang, résonnent, résonnent encore, sans cœur et sans corps. Ces
sombres fables comptées jusqu'au sang résonnent encore, sans cœur et sans corps.